2.4. Des utilisations impropres ou incorrectes du mot « archives »
En marge des définitions correctes, il en subsiste d'autres qui donnent au terme des sens trop restrictifs ou péjoratifs, soit qu'elles les assimilent à des documents précieux conservés au seul service des érudits, soit qu'elles les réduisent à des papiers anciens sans importance.
L'exemple de l'inexactitude vient de loin. La définition de la plupart des dictionnaires nous renvoie à des collections de pièces ou des documents anciens. Nous avons tous lu et entendu avec agacement ces journalistes sans imagination qui ressentent le besoin d'ajouter le qualificatif «poussiéreuses», chaque fois qu'ils écrivent le mot «archives».
Ce mot est souvent employé aussi dans des sens très éloignés de la réalité des professionnels des archives. Il est même parfois détourné de la matière même qu'il représente : il suffit pour cela de lire la presse ou d'écouter des journalistes de radio ou de télévision pour l'entendre employé comme synonyme de manuscrits, de documents inutiles ou inutilisés ou encore de banque de données.
Il est incorrect aussi d'utiliser le terme «archives» en français dans le sens anglais du mot "archives". En anglais, le terme «archives» désigne les seules archives définitives, conservées à long terme et l'usage réserve généralement le terme «records» aux archives courantes, celles que l'on vient de créer. Le singulier est même devenu le nom d'un groupe rock anglais du Royaume-Uni!...
Complément : certaines fausses idées associées au mot «archives»
Le terme "archives" est encore pour beaucoup la base de considérations péjoratives et de connotations passéistes. Il est par exemple fréquemment associé à des adjectifs comme ancien, vieux, désuet, poussiéreux. Les archives, c'est encore trop souvent « ringard » !...
En juin 2003, la revue Historia (France) a publié un dossier très documenté sur les archives françaises et leur actualité. Un des reporters, Eric Pincas, chargé de rédiger un long article sur les Archives départementales de l'Oise, intitulé "Avec les nouveaux gardiens de la mémoire", commence sa rédaction par cette phrase, bon reflet de l'image renvoyée de prime abord par les archives, image complètement transformée à l'issue de sa visite :
"A pour ancien ; R pour recherches ; C pour cartons ; H pour histoire ; I pour incommunicable ; V pour vétuste ; E pour Elitiste ; S pour saturé....Images stéréotypées, pas toujours flatteuses, associées à un seul mot : archives. Tels sont les premiers clichés qui me viennent à l'esprit, dans le taxi qui me conduit de la gare de Beauvais au service d'archives départementales de l'Oise...".
Cette phrase pourrait être reformulée ainsi : pour ce journaliste, les archives se résument à des cartons remplis d'anciens documents entassés dans des locaux saturés et vétustes, destinés aux recherches d'une petite élite d'historiens autorisés, mais largement inaccessibles et inexploitables pour la majeure partie de la population.
Et pourtant la situation est tout autre ! D'ailleurs la vision du journaliste a complété changé après sa visite. Il découvre des locaux neufs, spacieux, adaptés à la conservation, des espaces fréquentés par des lecteurs très divers, dont une classe de jeunes enfants découvrant le patrimoine de leur département, des ateliers en pointe, des ordinateurs, etc.