Module 3, section 3 : Variété des contextes constitutionnels, géopolitiques et institutionnels : quelques exemples de lois

2.3.2. Éléments notables

Archives publiques et privées

La loi sur les archives du Québec porte tant sur les archives publiques que privées (art.1). Ainsi le chapitre II (art 4 à 20) de la loi concerne-t-il les archives publiques, le chapitre III (art. 21 à 28) les archives privées. Les définitions du chapitre I s’appliquent, autant que de besoin, tant aux archives privées que publiques.

Définitions

La loi s’efforce de définir, dans le corps même du texte législatif, les principaux termes d’archivistique auxquels elle a recours. Ainsi, dès l’article 2 sont définis les mots "archives", - l’ensemble des documents, quelle que soit leur date, nature, produits ou reçus par une personne ou un organisme pour les besoins ou l’exercice de ses activités et conservés pour leur valeur d’information générale -, "archives publiques" et "archives privées", ce que font bon nombre de lois d’archives à travers le monde.

Mais la loi québécoise définit aussi le mot "document" et les trois âges de archives sous les vocables de "document actif", "document semi-actif" et "document inactif".

Elle définit également ce qu’il faut entendre par organisme public (art. 2) et en donne la liste exhaustive en annexe à la loi. Cette annexe, qui donne la liste des "organismes réputés publics", est particulièrement importante dans la mesure où elle hiérarchise ces organismes. Leurs obligations varient en fonction de leur place dans cette hiérarchie. Ainsi, seuls les organismes mentionnés au paragraphe 1 de l’annexe se voient imposer une politique de gestion de leurs documents actifs et semi-actifs par le ministre (art.4) . Les organismes visés aux paragraphes 2 et 3 se voient simplement proposer une politique de gestion de ces mêmes documents (art.5). Quant aux organismes visés aux paragraphes 4 à 7 ils adoptent eux-mêmes une politique de gestion de leurs documents actifs et semi-actifs (art.6). On le voit, l’ingérence de l’administration des archives varie selon le degré de proximité de l’organisme avec le noyau dur de la sphère publique. Il est vrai que le caractère public ou privé d’un organisme est d’abord fonction, abstraction faite de la question juridique, de l’équilibre que trouve chaque pays - de par son histoire, ses choix politiques - entre ce qui est considéré comme relevant du secteur public et ce qui peut être confié au secteur privé.

Calendrier de conservation

La loi fait obligation à tous les organismes publics d’établir un calendrier de conservation de leurs documents (art.7). Dans certains cas, ce calendrier doit être approuvé par l’administration des archives, parfois il est simplement transmis pour information (art.8 à 11).

Versements des archives

La loi sur les archives du Québec choisit clairement le parti du versement d’archives entraînant transfert de propriété : (art. 3) « Dans la présente loi, le versement d’un document […] en transfère la propriété. »

Attention

Ce choix n'est pas toujours retenu dans les lois d'archives (ainsi la loi française sur les archives prévoit que le versement dans un service d'archives n'entraîne pas transfert de propriété, même si les archives sont des archives historiques définitives).

La loi prévoit pour la plupart des organismes publics une obligation de versement annuel de leurs documents inactifs (art. 15). Pour les autres organismes il s’agit soit d’un dépôt, soit d’une obligation d’assurer eux-mêmes la conservation de leurs documents inactifs à conservation permanente.

Plusieurs articles sont destinés à favoriser le respect de l’unité des fonds (même si cette dernière expression ne figure pas en tant que telle dans la loi). Ainsi, en cas de cessation d’activité d’un organisme public, ses archives doivent aller à un seul organisme, même si ses missions sont exercées par plusieurs organismes désormais (art. 17). En matière d’archives privées, nul ne peut, à des fins commerciales, fractionner un fonds d’archives privées constitué de documents produits ou reçus par une personne dans l’exercice de ses fonctions (art. 28).

Aliénation et élimination des archives

L’aliénation, l’élimination ou la modification de documents inactifs d’organismes publics destinés à être conservés de manière permanente est prohibée. Seul le conservateur des archives peut, à titre exceptionnel (documents reproduits sur d'autres supports, documents détériorés), autoriser l’élimination (18.).

Communicabilité des documents

La loi est très brève en matière de communicabilité des documents. Elle renvoie, en effet, à la loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels (1982). L’article 19 de la loi sur les archives prévoit cependant que « Les documents inactifs qui sont destinés à être conservés de manière permanente et auxquels s’appliquent des restrictions au droit d’accès en vertu de la loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels sont communicables, malgré cette loi, au plus tard 100 ans après leur date ou 30 ans après la date du décès de la personne concernée. Sauf si la personne concernée y consent, aucun renseignement relatif à la vie privée d’une personne ne peut cependant être communiqué avant l’expiration d’un délai de 100 ans de la date du document. »

La loi québécoise est aussi une des rares lois d'archives qui ait choisi, en matière d'archives privées, d'encadrer leur communicabilité. Ainsi, l'article 26 de la loi prévoit-il que « la personne qui dépose ou verse des archives privées auprès du conservateur ou d'un organisme public (...) peut convenir avec lui, par écrit, d'un délai pendant lequel ces archives ne sont pas accessibles. A défaut de convention à cet effet, le conservateur ou l'organisme public peut déterminer ce délai. Aucun délai ne doit être supérieur à 100 ans de la date des documents ou, s'il s'agit de renseignements nominatifs, à 30 ans de la date du décès de la personne concernée. La personne visée au premier alinéa conserve toutefois pour elle-même ou pour une personne qu'elle autorise l'accès à ces archives. »

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