2.2. Technologies existantes
Schématiquement, on peut dire qu’il existe cinq grandes familles de technologies pour les supports d’enregistrement :
• Les technologies mécaniques (bandes et ruban perforées) qui ont disparu aujourd’hui.
• Les technologies magnétiques qui sont les plus anciennes et qui progressent de façon régulière depuis les années 1950. Les supports magnétiques prennent la forme de bandes (appelées aussi cartouches dans certains cas) et de disques, comme par exemple le disque dur de votre ordinateur,
• Les technologies optiques qui datent du début des années 1970 (le Laserdisc a été construit en 1972) mais qui se sont développées au moment de la mise sur le marché des premier CD audio en 1981. Les supports les plus connus sont naturellement le CD-R (disque compact enregistrable), le DVD-R (DVD enregistrable) et plus récemment le Blu-Ray (appelé aussi laser bleu mais dont l’appellation officielle est BD). Le BD a une capacité de stockage de 25 Go en simple face et 50 Go en double face. Il a aussi existé des supports optiques sous forme de bandes,
• Les technologies magnéto-optiques, combinaison des deux précédentes, la lecture étant purement optique. C’est le cas de l’UDO (Ultra Optical Disc) qui est un disque de 133 mm de diamètre. Sa capacité de stockage de 60 Go (une face) ou 120 Go (deux faces) et sa durée de vie estimée à 50 ans en font un candidat possible pour l’archivage, malgré un coût élevé et une vitesse d’enregistrement assez lente,
• Les mémoires flash qui sont des mémoires de masse à semi-conducteurs réinscriptibles. Elles sont utilisées dans les clés USB, les baladeurs numériques, les appareils photos et, depuis quelques années, sur de nouvelles générations d’ordinateurs portables.
Les technologies magnétiques, optiques ou magnéto-optiques impliquent toujours un mouvement du support pour la lecture ou l’écriture (le disque tourne, la bande magnétique doit être déroulée), ce mouvement est nécessairement un facteur de risque d’usure ou de panne, alors que ce n’est pas le cas pour les mémoires à semi-conducteurs.
Une capacité de stockage qui s’envole !
La capacité de stockage des supports d’enregistrement a augmenté de façon phénoménale en 40 ans.
Au début des années 1970, le support le plus courant était la bande magnétique 9 pistes avec une densité de 800 bpi (bits per inch) et une capacité de 20 Mo. En 2009, toujours avec une technologie magnétique, IBM produit des cartouches magnétiques beaucoup plus petites que la bande 9 pistes avec une capacité de 1 Téraoctets (To). Il y a un facteur 50 000 entre la capacité de chacun de ces deux supports. Les supports disques ont évolué dans des proportions équivalentes. Et demain, lorsque les technologies optiques ou magnétiques auront atteint leurs limites, ce sont les mémoires holographiques qui prendront probablement le relais.
Complément :
CD-R et DVD-R
Le CD-R (disque compact enregistrable apparu sur le marché en 1988) et le DVD-R (Digital Versatile Disc enregistrable apparu sur le marché en 1997) constituent des supports grand public peu coûteux et potentiellement intéressants pour l’archivage.
Pour ces deux types de support, il existe des analyseurs (appelés aussi testeurs) matériels ou logiciels, qui sont capables de fournir un ensemble d’informations utiles sur l’état du support.
Les atouts :
- pas de réécriture possible (nous parlons bien des DVD-R et DVD-R et non des CD-RW et DVD-RW qui sont réinscriptibles),
- une structure physique et logique définies par la norme ISO 9660 pour le CD. Par contre, il y a plusieurs standards concurrents pour le DVD, même si aujourd’hui les lecteurs sont compatibles avec tous,
- l’existence d’outils d’analyse fiables et accessibles,
- une grande simplicité de mise en œuvre.
Mais aussi des inconvénients :
- une capacité réduite, souvent insuffisante par rapport aux besoins d’aujourd’hui, surtout pour le CD-R,
- une durée de vie nettement moindre que celle des CD audio pour lesquels le processus de fabrication est différent,
- les produits supposés être dédiés à l’archivage professionnel par leurs fabricants sont d’une fiabilité incertaine (voir ci-après, les études menées sur ce sujet par le Laboratoire national de métrologie et d’essai pour la direction des Archives de France),
- les opérations de contrôle des supports sont lourdes (pas d’automatisation du chargement dans un testeur ni de l’exploitation des résultats). De même pas de possibilité d'automatisation des migrations pour tout un lot.
Les analyseurs :
Ils permettent d’extraire un ensemble de paramètres parmi lesquels :
• l’évaluation des erreurs rencontrées avant des entrelacements : l’information « telle qu’elle a été inscrite sur le disque » :
- le BLER (BLockErrorRate) : taux de blocs comportant une erreur,
- le FBE ou BERL (Frame Burst Error ou Burst ERror Length) correspondant à la plus longue salve de blocs erronés ; ce paramètre est plus significatif que le BLER.
• l’évaluation des erreurs après désentrelacement : l’information « exploitable par la machine » :
- les erreurs E32 qui sont les erreurs non corrigibles conduisant à une perte de données,
- les erreurs E22 correspondent au nombre de blocs comportant deux erreurs corrigibles (risque élevé de E32.
Le LNE (Laboratoire national de métrologie et d’essai) recommande, pour l’archivage, un ensemble de valeurs maximales pour ces paramètres :
Titre du tableau : Les seuils acceptables proposés par le LNE
Valeurs initiales des taux d'erreur acceptables proposées par le LNE | Valeurs maximales des taux d'erreur avant migration proposées par le LNE | |
FBE (BERL) | ≤ 4 | 7 |
BLER (moyen) | <6 | 50 |
BLER max | <50 | 220 |
E22 | ≤ 7 | 30 |
E32 | 0 | 0 |
Etudes disponibles sur le sujet :
A la demande de la direction des Archives de France (DAF), Le LNE a conduit une série d’études sur l’utilisation des CD-R et DVD-R pour l’archivage.
Sur cette base, la DAF a émis un certain nombre de directives et de recommandations.
Nous pouvons suggérer les documents suivants :
• La conservation de données sur CD-R (juillet 2004)
• Qualité des DVD disponibles sur le marché pour l’archivage des données numériques (octobre 2008)
• Qualité des CD-R disponibles sur le marché pour l’archivage des données numériques (juillet 2008)
• Guide à l’usage des services d’archives pour la réalisation de la migration de stocks de CD-R (mars 2009)
• Recommandation de la Direction des Archives de France (DAF) relative à la gravure, à la conservation, et à l’évaluation des CD-R (mars 2005)
Cette recommandation couvre l’ensemble de la chaîne en incluant le choix du CD-R, le choix du graveur, le mode de gravure, les conditions de stockage, la surveillance et le renouvellement des CD.
Autres études disponibles :
• Care and Handling of CDs and DVDs en ligne sur le site du « National Institute for Standards and Technologies »
• IASA guidelines on the production and preservation of digital audio objects, BRADLEY Kevin, 2004
Les recommandations pratiques :
• Pour la gravure :
• graver au moins 2 exemplaires
• un master d’archivage,
une copie de consultation,voire une copie de travail d’où seront tirées les copies de consultation (si elles sont très sollicitées),
• constituer un échantillon-témoin représentant tous les numéros de série, tous les graveurs, toutes les périodes de temps, et enregistrer ces métadonnées,
• Pour le stockage : stocker les supports sur de sites distants,
• Pour le contrôle du vieillissement :
• contrôler tous les 3 ans au plus à partir de la gravure,
• tester les disques échantillonnés en totalité à vitesse 1x,
• si un disque approche des seuils limite, engager la recopie du sous-ensemble.
Ces recommandations rejoignent les recommandations générales qui peuvent être proposées pour tous les types de support.
Le disque optique est support commode pour commencer, mais il y a nécessité de mettre en œuvre d’autres solutions (substitutives ou complémentaires) à moyen et long terme