4.4. Les procédés couleur

Dès les premiers daguerréotypes, des recherches sont engagées pour aboutir à des photographies en couleur.

4.4.1. Les premières photographies en couleur

En 1869, les premiers tirages couleurs sont dus à Ducos du Hauron qui met au point un procédé compliqué, mais prometteur, de prise de vue à travers trois filtres de couleur, selon le principe de la trichromie encore utilisée par l’imprimerie.

Sur cette base, l’Irlandais John Joly crée en 1894 un nouveau procédé qui permet de produire des diapositives à partir d’un négatif noir et blanc exposé à la lumière derrière une multitude de filtres microscopiques bleus, verts et rouges réunis en une mosaïque.

De nombreux brevets mettant en œuvre ces principes seront déposés jusqu’en 1938, notamment le procédé Agfacolor et les autochromes.

L’autochrome, commercialisé à partir de 1907 par les frères Lumière, est à l’origine une plaque de verre couverte d’un réseau de fécules de pomme de terre colorées en rouge-orangé, violet et vert et d’une émulsion photosensible. Cette plaque est exposée dans un appareil photographique en la retournant de façon à ce que la lumière traverse les particules colorées avant d’atteindre la couche sensible. Enfin, la plaque est développée. A ce stade, la plaque si elle est fixée, se présente sous la forme d’un négatif qui présente par transparence les couleurs complémentaires de celle de l’objet photographié. Pour obtenir un positif, il faut inverser l’image par un deuxième développement du bromure d’argent non influencé par la lumière lors de l’exposition. On obtient dès lors une diapositive sur verre qui présente par transparence les couleurs de l’objet photographié. La plaque est protégée par un vernis.

A partir de 1931, le support verre est remplacé par un support souple. En 1935, l’arrivée sur le marché d’un nouveau procédé, le kodachrome, voue l’autochrome à la disparition.

Les altérations possibles sont celles que peuvent subir tous les clichés au gélatino-bromure et en plus, celles plus spécifiques au réseau coloré :

  • Altération des couleurs : malgré une grande stabilité apparente, il peut y avoir jaunissement des vernis

  • Taches vertes dues à la diffusion du colorant vert solubilisé par l’eau, la plupart du temps au moment du traitement d’une plaque défectueuse, ou lors d’une immersion accidentelle plus récente dans l’eau.

  • Taches brunes liées à une oxydation de l’argent.

  • Dédoublement des couches, provoqué par des variations climatiques

  • Abrasions et salissures de surface

  • Développement de micro-organismes : pour protéger la surface des autochromes, ils ont souvent été doublés d’une plaque de verre ; au cours de cette opération, un certaine quantité d’humidité a été enfermée et peut se condenser quand la température baisse ce qui favorise l’installation de micro-organismes qui détruisent l’image. D’autre part, la gélatine se ramollit et adhère à la plaque de verre de protection.

  • Réticulation du vernis, sous l’effet de l’humidité.

4.4.2. Les photographies en couleur modernes

De nouveaux procédés, basés sur des concepts très différents des précédents, vont voir le jour à partir de 1935. Mais c’est seulement à partir de 1970 que la photographie en couleur va vraiment se développer et tend à remplacer la photographie en noir et blanc.

Toutes les photographies en couleur moderne sont constituées de trois colorants (jaune, magenta, cyan) répartis respectivement dans trois couches de gélatine superposées.

On distingue quatre procédés principaux :

  • Les émulsions à développement chromogène à coupleurs incorporés : c’est le procédé lancé en 1935 par Kodak sous le nom de Kodachrome. Un support est recouvert de trois couches superposées d’émulsion au gélatino-bromure d’argent. Chaque couche est sensibilisée à une lumière de couleur différente : bleu, vert et rouge. Dans chacune se trouve un coupleur, produit incolore qui, après l’exposition, réagit lors du développement avec un révélateur chromogène pour former le colorant jaune, magenta ou cyan.Tout l’argent est ensuite éliminé dans un bain de blanchiment, puis de fixage.

  • Le c ibachrome, créé par Ilford, permet de réaliser des tirages à partir d’une diapositive. Ce procédé est basé sur la destruction sélective des trois colorants, tous présents dans la couche sensible. Lors du développement, le colorant est détruit aux endroits où se forme l’argent métallique, qui est ensuite dissout.

  • Le polaroïd à développement instantané : ce procédé est basé toujours sur la superposition de couches sensibles aux trois types de lumière et sur la diffusion et le transfert de colorants réagissant en milieu basique pour former l’image colorée.

  • Les procédés artisanaux Dye-transfer et Fresson : ce sont deux procédés très coûteux, utilisés seulement pour les tirages de collection ou la publicité.

    • Le dye-transfer : trois matrices en gélatine correpondant à la sélection trichrome sont tirées, puis imprégnées de colorants, enfin transposées sur un papier baryté et gélatiné pour former la photographie en couleur.

    • Le procédé Fresson, héritier des procédés au charbon, consiste à reporter quatre couches de gélatine bichromatée teintées avec des pigments sur un même support.

Les photographies en couleur posent de gros problèmes de conservation. Celles obtenues par un développement chromogène sont les plus fragiles. Les colorants se dégradent sous l’effet de la lumière, mais aussi dans l’obscurité. Généralement le cyan s’altère plus vite que les deux autres colorants, introduisant ainsi une variation considérable du rendu des couleurs par rapport au cliché tel qu’il était lors de sa production.

D’après des tests de vieillissement, on estime que le film kodachrome conservé dans l’obscurité et dans des conditions climatiques correctes a une durée de vie de 90 ans, alors que le dye-transfer peut aller jusqu’à 300 ans et l’ektachrome (diapositive) commence à changer de couleur au bout de 30 ans. Parmi les tirages couleurs le cibachrome s’avère particulièrement stable dans l’obscurité comme à la lumière.

Les films négatifs couleur s’altèrent au bout d’une dizaine d’années.