La notion de facettes appliquée aux archives : un outil pour faciliter l'organisation et la diffusion.
Article co-écrit par Sabine Mas, professeure agrégée à l'Ecole de bibliothéconomie et des sciences de l'information (Université de Montréal) et Simon Côté-Lapointe, candidat au doctorat en sciences de l'information (Université de Montréal).
L'application de la théorie des facettes en archivistique est une piste de solution pour améliorer l’organisation des documents et les interfaces de navigation.
La croissance exponentielle des archives et leur dématérialisation poussent à repenser la façon dont sont organisés et décrits les documents d’archives et les données et métadonnées y étant associées. Issue de la bibliothéconomie, la théorie des facettes peut faciliter la gestion et la diffusion numérique de documents d’activité (records) et d’archives historiques.
La notion de facette
Formulées par le bibliothécaire et mathématicien Ranganathan (1967), les facettes sont des groupes conceptuels combinés entre eux et utilisés pour représenter des sujets complexes ou les attributs d’un objet. À la différence de la classification hiérarchique traditionnelle, l’efficacité des facettes tient à leur capacité à intégrer différentes dimensions d’analyse mutuellement exclusives sur des sujets ou des objets informationnels, à caractériser et à rendre l’accès à l’information plus facile en offrant de multiples voies de navigation vers n’importe quel document ou notice descriptive.
Les modalités des facettes
On dénombre trois modalités d’application de la théorie des facettes: l’analyse par facettes, la structure par facettes et le dispositif à facettes (Figure 1). L’analyse par facettes est réalisée à l’aide de règles de classification, la structure à facettes est fixée à l’aide de schémas et le dispositif à facettes est concrétisé à l’aide de moyens technologiques. L’analyse par facettes désigne le processus analytico-synthétique (Foskett, 2009) par lequel on déconstruit un univers original (Beghtol, 2008) (un ensemble de sujets ou d’objets donné, un fonds d’archives par exemple) à l’aide des catégories fondamentales comme principe de division (Mills, 2004). Ces dernières sont des règles servant à extraire les facettes d’un ensemble donné (Broughton, 2006, p. 53). Ranganathan propose cinq catégories fondamentales – Personnalité (objet ou sujet principal), Matière (substance), Énergie (activité ou action), Espace (lieu) et Temps –, mais, selon les caractéristiques de l’ensemble à analyser, d’autres catégories fondamentales peuvent être sélectionnées.
Les structures à facettes désignent les schémas classificatoires résultant de l’analyse par facettes d’un univers original. Elles peuvent se présenter sous plusieurs formes: ontologies, classifications, schémas de métadonnées, vocabulaires contrôlés pour l’indexation, thésaurus, etc. (Gnoli, 2008b; Maniez, 1999).
Les dispositifs à facettes désignent les moyens technologiques qui permettent à un usager de rechercher, d’utiliser ou d’indexer des objets ou des sujets à l’aide des facettes. Par exemple, les interfaces web de recherche à facettes (Fagan, 2010), les moteurs de recherche à facettes dans un ordinateur personnel, les documents, bases de données ou métadonnées encodées ou organisées par facettes, etc.
Les applications en archivistique
Surtout appliquée en bibliothéconomie (Maisonneuve et Touitou, 2007), en informatique (Dumais, 2009; Tunkelang, 2009) et en organisation de la connaissance (Desfriches Doria, 2012; Hjørland, 2013; Hudon et El Hadi, 2017), la notion de facettes se développe depuis quelques années en archivistique. Elle constitue l’objet de recherche de plusieurs chercheurs en sciences de l’information (Hudon et Mas, 2001; Mas et Marleau, 2009; Mas, Maurel et Alberts, 2011) et a été mise en production dans plusieurs organismes du gouvernement fédéral canadien pour l’indexation et le repérage de leurs documents d’activité.
Source : Arbido, revue professionnelle pour archivistes, bibliothécaires et documentalistes.