Le serment des archivistes du Sénégal (23/09/08)
Les archivistes du Sénégal sont désormais tenus de prêter le serment qui suit.
Le serment des Archivistes du Sénégal: « un équilibre entre droit au savoir et respect de la vie privée »
Ces deux principes contradictoires et souvent difficilement conciliables sont les fondements de toute la théorie archivistique sur la communicabilité des documents.
Les acquis démocratiques dans les nations modernes offrent au citoyen la possibilité de défendre ses droits et ses prérogatives contre tout adversaire , y compris l'Etat lui même ,en usant des ressources informationnelles conservées dans les archives .
D'autre part à l'ère de l'information ,les exigences impérieuses de la demande sociale et de la recherche nous imposent souvent le droit de retracer la vérité historique des évènements quelqu'en soit l'époque avec la mise à la disposition des chercheurs aussi rapidement que possible de toutes les sources de l'histoire nationale dont ils ont besoin. « Dès lors les Archives sont saisies par le droit et quelque part même elles commencent à avoir leur jurisprudence »
Seulement l'Etat dont le rôle est d'asseoir la stabilité politique ,de protéger la vie privée, l'intimité et l' honorabilité des citoyens contre l'indiscrétion ne peut laisser faire .
Il lui faut en conséquence « assurer cet équilibre qui ne peut résulter que de l'harmonie des contraires ».
Dans la loi d'archives , le législateur Sénégalais a confié aux archivistes comme à tous autres techniciens de l'information documentaire travaillant dans un dépôt d'archives une difficile tâche de médiation entre les documents dont ils ont la garde et le public qui veut à tout moment jouir de son droit d'accès à l'information.
Cette médiation est cependant astreinte à beaucoup de restrictions qui ont pour noms
- Secret professionnel
- divulgation des secrets d'état
- respect de la vie privée
L'article 10 de la loi 2006-19 du 30 juin 2006 relative aux Archives et aux documents administratifs stipule « Les Archivistes et Agents travaillant dans les services d'archives sont tenus au secret professionnel ».
Cette mise en garde sévère s'applique à toutes les catégories socio professionnel sans exception en fonction dans le service et signifie qu'ils ne sauraient user de privilèges quelconques que puisse leur conférer la qualité de conservateur ou de manipulateur des papiers publics .
Les archivistes comme les autres agents qui ont de telles charges sont liés par le secret professionnel, et en cas de manquement ils sont frappés par les textes relatifs à la divulgation de documents secrets ou confidentiels.
Les archives publiques faisant partie du patrimoine de la nation, l'Etat qui en est le propriétaire dispose en même temps de la propriété du contenu moral de l'information administrative élaborée ou reçue par ses agents et ses différents démembrements.
Il ne saurait accepter qu'un élément de son personnel publie sans autorisation un document dont il aurait eu connaissance en raison de ses fonctions.
Cette divulgation du secret d'Etat par un agents public est lourdement sanctionnée par le code pénal
Les risques du métier d'Archiviste se sont accrus. Il se trouve écartelé entre deux obligations, deux devoirs qui semblent contradictoires .
D'une part sa première mission est c'elle de récoler trier, classer et conserver les archives de l'Etat, voire de la nation et préparer ainsi l'édition de notre future histoire . D'autre part, il lui revient également la mission de satisfaire au désir de chaque citoyen en quête de sa mémoire .
La mémoire qui se définit come une réponse psychologique à un fait de société passé mais qui reste toujours vivant et actuel.
Secret professionnel ,respect du droit à la vie privée , devoir de mémoire , droit à l'information , autant d'obligations qui illustrent une certaine ambiguïté dans l'accomplissement de notre métier.
L'article 7 du code de déontologie relativise les contraintes et permet à l'archiviste d'évaluer sur la conduite à tenir : « Les archivistes visent à trouver le juste équilibre ;dans le cadre de la législation en vigueur entre le droit au savoir et le respect de la vie privée »
Le législateur sénégalais , plus exigeant reste attaché à la confidentialité et au respect de la vie privée du citoyen. Ainsi met -il l'archiviste « dans une situation constante de cacher » Pour des raisons aussi variées que sont :
- l'atteinte à la sureté de l'état ou à l'ordre public
- La Protection de l'honneur des familles et des individus.
c'est tout un arsenal d'interdictions de communiquer des documents qui s'imposent à lui.
« Je jure de garder secrètes les informations auxquelles, de par mes fonctions ,je pourrais accéder ,et de rien publier qui soit contraire aux lois, aux règlements, à l'ordre public, aux bonnes mœurs, à l'honneur des familles et des individus ,à la sûreté de l'état et à la sécurité publique, même après cessation de mes fonctions . »
Ainsi dans cette recherche de l'équilibre entre le droit à l'information, la protection de l'Etat et de l'individu l'archiviste se trouve confronté à un problème de conscience, un état de contrainte perpétuel qu'il devra assumer tout le long de son activité professionnelle et même au delà ,après cessation de ses fonctions .
Serait-on tenté de se demander si nos jeunes collègues sont assez préparés à l'exercice d'une tâche à la fois technique et politique ?
Sont-ils assez outillés pour assurer l'équilibre entre le droit à l'information et le respect de la personne ?
Ont-ils connaissance des règles de l'éthique et de la morale professionnelle ?
Voilà autant de paramètres utiles pour affronter le métier d'archiviste « qui est devenu un métier à risque».
Source : Atoumane Ndiaye Doumbia Conservateur d'archives